Alors que débute à Paris le lundi 20 novembre le congrès annuel des maires de France, une enquête récente menée par le prestigieux Centre de recherches politiques de Sciences Po met en évidence une aggravation notable des incivilités et des violences auxquelles ces élus locaux sont de plus en plus fréquemment confrontés. Cette enquête inquiétante reflète une triste réalité : la « fatigue républicaine » des maires, c’est-à-dire leur épuisement grandissant face à des problèmes de plus en plus nombreux et complexes.
D’après une enquête du Cevipof, publiée le dimanche 19 novembre et consultée par franceinfo, près de sept maires sur dix affirment être victimes d’incivilités. Ce chiffre représente une augmentation de 16 points par rapport à l’année 2020. Cette information a été révélée à la veille du 105e Congrès des maires, qui débute le lundi à Paris au parc des expositions de la Porte de Versailles.
Les actes de violence à l’encontre des élus, symbolisés récemment par la démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins (Loire-Atlantique) et l’incendie du domicile du maire de L’Haÿ-les-Roses (Val-de-Marne) lors des violences urbaines, ne cessent de croître. Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, 2 265 plaintes et signalements ont été déposés en 2022 par des élus, ce qui représente une augmentation de 32% par rapport à 2021. L’enquête du Cevipof souligne également que « les premières indications pour l’année 2023 suggèrent de nouveau une hausse de 15% des violences envers les élus locaux ».
Insultes, menaces, voire violences physiques :
Parmi les 6 000 maires interrogés lors de cette étude, près de quatre sur dix (39%) admettent avoir déjà été injuriés ou insultés. Plus d’un quart (27%) ont été attaqués ou menacés sur les réseaux sociaux. Seulement 2% des maires interrogés dénoncent des violences physiques. De plus, 12% des élus reconnaissent que leur famille a également subi des violences. Dans ce contexte, 15% des élus interrogés admettent ressentir un sentiment d’insécurité, contre 11% pour le reste de la population selon les données de l’Insee.
Après la démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins au printemps dernier, l’Etat a annoncé le déploiement de 3 400 référents « atteintes aux élus » dans les gendarmeries et les commissariats, afin de faciliter la dénonciation des actes. Cependant, les quelque 6 000 maires interrogés, entre mi-septembre et mi-octobre, estiment toujours que les délais de traitement des plaintes sont trop longs. Selon eux, ce manque de rapidité entache leur autorité et les expose à des représailles.
Cette enquête, commandée par l’AMF (Association des Maires de France) et le gouvernement durant l’été dernier, permet également de mieux comprendre le malaise des maires. Selon le Cevipof, qui s’appuie sur le répertoire national des élus, 1 300 d’entre eux ont démissionné depuis le début de leur mandature en juin 2020. Cela représente 450 démissions par an, contre 350 lors de la précédente mandature.
Une « fatigue républicaine » aggravée par des indemnités insuffisantes :
Cependant, la hausse des violences n’est pas la seule raison de cette « fatigue républicaine », souligne l’enquête qui évoque des « causes multiples ». Les maires pointent du doigt les fortes exigences de leurs administrés (13,6%), les relations de plus en plus complexes avec les services de l’État (12,3%), les difficultés à concilier leur mandat avec leur vie personnelle ou professionnelle, surtout lorsqu’ils ne sont pas à la retraite (10,1%). Ils dénoncent également le manque de ressources financières et fiscales (7,8%). Dans tous ces domaines, ils attendent des améliorations.
La question des indemnités n’est jamais mentionnée comme une condition de leur engagement. Les maires ne cherchent pas à gagner de l’argent. En revanche, lorsqu’ils sont encore dans la vie active, ils ne sont pas prêts à en perdre. Ce que révèle l’étude, c’est que leur position sur ce point a changé depuis 2020, donc depuis le début du mandat en cours : alors, un quart d’entre eux estimaient ne pas être suffisamment indemnisés. Aujourd’hui, ils représentent la moitié (48%). Dans les villes de plus de 9 000 habitants, où être maire est un travail à plein temps, c’est même plus des trois quarts (78%).
Le gouvernement réfléchit à une revalorisation des indemnités. Le Cevipof, en plus des questionnaires écrits, a rencontré une trentaine de maires en tête-à-tête. Ils sont unanimes : augmenter leurs indemnités en puisant dans le budget de fonctionnement de leur commune serait une mauvaise solution.
source informationnelle : francetvinfo.fr
rédaction : intelligence artificielle